Le Hérisson d'Europe, désormais "quasi menacé" : l'urgence d'agir pour sa survie

Mercredi 30 Octobre 2024
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Philippe Massit / OFB

Le Hérisson d'Europe (Erinaceus europaeus), jusqu’alors classé en "préoccupation mineure" sur la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), est désormais classé en tant qu'espèce "quasi menacée". Ce changement de statut, annoncé lors de la COP16 sur la biodiversité, reflète un déclin rapide de sa population dans de nombreux pays d’Europe de l’Ouest, notamment au Royaume-Uni, en Norvège, en Suède, au Danemark, en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne et en Autriche.

Un espèce clé pour les écosystèmes européens

Espèce protégée, le Hérisson est un mammifère nocturne qui joue un rôle clé dans nos écosystèmes. Il se nourrit d’insectes, de vers de terre, d'escargots, de limaces, et contribue à réguler les populations de ces invertébrés, équilibrant ainsi les jardins et les zones naturelles. En s’abritant sous les haies, les tas de feuilles, et les sous-bois, il trouve des espaces propices pour se nourrir et se reproduire. Sa capacité de se rouler en boule, grâce à ses 8 000 piquants, le protège des prédateurs naturels comme les blaireaux, les renards ou les chouettes.

Le cycle de vie du Hérisson est toutefois assez court, en moyenne deux ans, même si certains individus peuvent vivre jusqu'à 9 ou 12 ans. Les hérissons peuvent se reproduire dès leur première année, donnant naissance à des portées de trois à cinq petits. Mais leur cycle de vie reste fragile : la majorité ne se reproduit qu'une à deux fois avant de mourir, ce qui est à peine suffisant pour maintenir leur population stable.

Une combinaison de menaces

Le Hérisson est soumis à plusieurs menaces importantes qui expliquent l’effondrement rapide de ses populations :

  1. Perte et fragmentation de l'habitat : L’expansion urbaine et l'agriculture intensive contribuent à fragmenter leur habitat, réduisant les zones où les hérissons peuvent se déplacer et trouver nourriture et refuge. Les clôtures, routes, et espaces bétonnés les isolent davantage, limitant leur espace de vie.
  2. Usage des pesticides et déclin des insectes : les pesticides, qu’ils soient employés dans les exploitations agricoles ou dans les jardins privés, sont une menace directe pour les hérissons. Ces produits détruisent de nombreux insectes et invertébrés, la base de leur alimentation. En conséquence, les hérissons peinent à trouver suffisamment de nourriture et le déclin global des insectes rend leur survie encore plus incertaine, ce à quoi s'ajoute un risque d'empoisonnement des individus via la chaîne alimentaire.
  3. Collisions avec les véhicules : a stratégie naturelle de défense du hérisson, qui consiste à se rouler en boule face aux prédateurs, devient fatale face aux voitures. Chaque année en France, des centaines de milliers de hérissons sont tués en tentant de traverser des routes, ajoutant une pression significative sur leurs populations.

Il est urgent d’agir à tous les niveaux

Face à ces menaces, il est essentiel de se mobiliser.

Moblisation des collectivités territoriales

Les collectivités territoriales ont un rôle déterminant dans la préservation du Hérisson d’Europe, en particulier par leurs actions de préservation et de restauration de la Trame verte et bleue (TVB). Elles peuvent ainsi limiter la fragmentation des habitats et garantir des continuités écologiques essentielles aux déplacements des espèces. Cela passe par des actions concrètes de restauration écologique sur le terrain - plantation de haies, gestion écologiques des espaces verts, aménagement de passages petites faunes - et par la protection des continuités écologiques dans les documents d'urbanisme. Les collectivités peuvent également mobiliser des outils fonciers adaptés pour sécuriser les zones à enjeux écologiques. Elles peuvent également mener des actions de sensibilisation des habitants aux bonnes pratiques.

Mobilisation des particuliers

Les particuliers peuvent aussi jouer un rôle dans la préservation des Hérissons d'Europe en adoptant des gestes simples mais efficaces pour protéger le hérisson et favoriser son retour dans nos espaces verts. Voici quelques actions concrètes :

  • Aménager des passages adaptés pour les hérissons : en laissant un passage d'environ 13 cm dans les clôtures de jardin, on permet aux hérissons de circuler entre les différentes parcelles pour se nourrir, s’abriter et se reproduire. Ce simple geste contribue à réduire la fragmentation des jardins. Des associations accompagnent ce type de démarche comme le Groupe mammalogique Normand et son programme Piqu'en ville.
  • Laisser une réserve d'eau et de nourriture adaptée : déposer des restes alimentaires sûrs (pas de lait ni de pain, qui sont mauvais pour leur santé) et mettre un point d'eau à disposition dans les jardins aide les hérissons à se nourrir et à maintenir leur hydratation, notamment en été ou durant les périodes de sécheresse.
  • Créer des refuges naturels : en favorisant la végétation naturelle, les tas de bois et les feuilles mortes, on peut offrir un abri aux hérissons. Laisser son jardin partiellement en friche attire les insectes, les vers, les escargots et les limaces, constituant une source de nourriture pour eux.
  • Cesser l’usage de produits chimiques : cesser l’usage de pesticides et autres produits chimiques dans les jardins est essentiel pour préserver les insectes, et ainsi le régime alimentaire des Hérissons. Promouvoir des pratiques de jardinage respectueuses de la biodiversité est un pas important vers la préservation de cette espèce.
  • Conduire avec prudence : dans les zones où les hérissons sont connus pour être actifs, réduire la vitesse en voiture peut limiter le nombre de collisions fatales. Une signalisation adaptée pourrait également sensibiliser les conducteurs.
  • Si vous trouvez un Hérisson blessé ou désorienté, notamment en pleine journée, contactez le centre de sauvegarde de la faune sauvage le plus proche.

Le déclin du Hérisson d'Europe n'est pas seulement une tragédie pour cette espèce, mais le reflet de menaces plus larges qui pèsent sur la biodiversité. La Liste rouge de l’UICN comprend en effet désormais 166 061 espèces, dont 46 337 sont menacées d’extinction.