Les rivières corses sont en danger, impactées par le changement climatique, l’augmentation moyenne des températures et le changement des régimes hydriques. Cela n’est pas sans conséquence pour le peuplement piscicole et notamment des espèces endémiques. Des solutions existent pour permettre aux rivières corses d'être plus résilientes à ces changements. L’une d’elles est le rétablissement de la continuité écologique.
Les impacts du changement climatique sont à l’œuvre sur les rivières corses
En Corse, la température moyenne annuelle de l’air a augmenté, depuis 1970, d’environ 1°C sur le littoral et de plus de 2°C au-dessus de 500 mètres d’altitude. Cette évolution impacte la ressource hydrique notamment au niveau du débit des cours d’eau, dont la baisse atteint 20 à 30 % depuis le milieu des années 80. Dans le cours supérieur des rivières, la température de l’eau en été dépasse 25 °C.
Au cours d’un cycle hydrologique, les événements extrêmes - étiages et crues - ont une fréquence et une amplitude plus grandes. La durée de l’étiage estival est passée de trois à cinq mois depuis le milieu des années 80. Le régime hydrologique des cours d’eau de Corse a varié d’un régime pluvio-nival méditerranéen à un régime pluvial méditerranéen en raison de la réduction du manteau neigeux en montagne. Les prélèvements destinés à l’alimentation en eau potable, notamment en lien avec le développement touristique et l’agriculture, viennent renforcer les effets du changement climatique sur la ressource en eau.
Des conséquences écologiques quantifiables
Les poissons sont très sensibles à l’augmentation de la température de l’eau. Elle entraîne des modifications au niveau de leur reproduction et de leur croissance, ce qui induit une modification de l’aire de répartition des espèces. Les conséquences écologiques se traduisent par un changement des limites altitudinales des organismes aquatiques, notamment des espèces endémiques. Les organismes d’eau froide se cantonnent au cours supérieur des rivières tandis que les organismes d’eau chaude remontent les cours d’eau, en relation avec l’augmentation de la température de l’eau.
Un panel de solutions
Il existe des solutions afin d’atténuer les impacts du changement climatique sur les poissons. La préservation et la restauration du bon fonctionnement des milieux aquatiques permet notamment d’augmenter leurs capacités de résilience face à ces modifications. Cela passe par le rétablissement de la continuité écologique, l’amélioration de la qualité des eaux, la gestion des ripisylves qui créent ombrage et caches, la mise en place d’une gestion durable de la pêche et la lutte contre les introductions d’espèces exogènes.
Des programmes d’actions ont été validés sur plusieurs cours d’eau, pour les bassins versants du Taravu, de la Gravona et du Prunelli. Les déclarations d’intérêt général permettront aux maîtres d’ouvrage - respectivement la collectivité de Corse, la communauté d’agglomération du pays ajaccien et la communauté de communes Celavu Prunelli - de pouvoir intervenir sur les cours d’eau et leurs berges. Ces opérations sont principalement consacrées à la restauration et à l’entretien de la végétation aquatique et rivulaire ainsi qu’à la gestion des embâcles. Elles apporteront un gain écologique significatif, favoriseront les capacités de résilience des milieux aquatiques et contribueront à la réduction des risques d’inondation. De tels programmes d’actions sont également en cours sur les bassins versants du Tavignanu et du Reginu.
Capitale française de la biodiversité 2017, la commune de Muttersholtz agit depuis 10 ans en faveur de la Trame verte et bleue. À l'origine de tout cela ? L'enthousiasme de Patrick Barbier, son maire, à qui nous donnons la parole.
La Trame verte et bleue est une démarche qui permet la reconquête progressive d’espaces écologiques, notamment en contexte d’agriculture intensive. C’est ce que nous expérimentons à Muttersholtz, commune de 2000 habitants située dans la riche plaine agricole d’Alsace. Petit à petit, patiemment, au gré des opportunités foncières, nous reconstituons un maillage d’infrastructures agro-écologiques : ripisylves le long des cours d’eau, corridors prairiaux, chapelets de mares, ceintures de vergers, haies champêtres, culture biologique…
Les instruments utilisés sont multiples : compensation écologique dans le cadre du remembrement agricole, gestion des terrains communaux, dialogue territorial dans l’aire d’alimentation de captage, travaux de génie écologique pour les cours d’eau et les zones humides fortement financés par l’Agence de l’eau Rhin-Meuse et la Région Grand-Est, emplacements réservés dans le plan local d’urbanisme, baux environnementaux, exonération de taxe foncière et priorité à l’agriculture biologique sur les terres communales, atelier associatif de jus de pomme, projet d’espace naturel sensible…
C’est une banalité de le dire mais cela doit être répété : la clé de la réussite de toute politique publique, particulièrement dans un domaine aussi complexe que celui de la biodiversité, réside dans la constance de la volonté politique sur plusieurs années, la connaissance du terrain et le dialogue entre les acteurs.
À Muttersholtz, la municipalité s’appuie sur le système d’information géographique pour avoir une vision claire des terrains communaux et de leurs usages. Elle s’adjoint également des compétences associatives comme celle de la Ligue pour la protection des oiseaux en matière d’expertise naturaliste. Ce partenariat a abouti à une véritable feuille de route cartographiée pour les projets de renaturation.
Le dialogue territorial doit être permanent, notamment avec les acteurs principaux que sont les agriculteurs. Rien ne peut se faire sans leur adhésion ou au moins leur compréhension des enjeux. Dans un contexte économique difficile, ils sont à la recherche de nouvelles solutions pour exercer leur métier. La commune dispose de leviers pour aider à cette recherche : mobilisation d’aides et de conseils agri-environnementaux, participation citoyenne, impulsion de plan alimentaire territorial (développement des circuits courts), diversification agrotouristique ou énergétique.
Au bout de ce travail collectif quotidien, nous pouvons témoigner que l’espoir n’est pas vain : à Muttersholtz, modestement mais sûrement, la biodiversité regagne du terrain !